François JOVY, prêtre réfractaire

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Nouvellement nommé archevêque, Jean Auguste de CHASTENET de PUYSÉGUR arrive de son Languedoc natal le 10 mars 1789 à Bourges, en pleine tourmente révolutionnaire.

Progressivement, il assiste à la contraction des prérogatives de son ministère : révocation de plein droit des baux postérieurs au 2 novembre 1789, suppression des ordres religieux dès le 13 février 1790 ce qui conduit un grand nombre de religieux du Berry à déserter et mise en vente dans la foulée des édifices religieux, vote  le 12 juillet 1790 par l'Assemblée Constituante de la Constitution civile du clergé visant à créer une Église nationale, intégrée dans l'État et indépendante de la papauté.

Un décret d'application en date du 26 décembre 1790 exige de tout prêtre la prestation immédiate du serment d'allégeance à la Constitution civile du clergé à l'issue de laquelle le religieux devient prêtre "jureur" ou "assermenté" par opposition à celui qui ne s'y soumet pas et demeure un prêtre "réfractaire". 
Vaillamment, le 4 janvier 1791, Monseigneur de PUYSÉGUR refuse de prêter serment ce qui lui vaut de perdre son titre d'archevêque et de Primat d'Aquitaine. Son successeur comme l'indique la Constitution nouvelle est élu par l'assemblée électorale du département.

Le refus de prêter serment de l'archevêque est suivi par le tiers de son clergé ce qui attise sans grand succès la propagande prônant l'analogie entre les opinions nouvelles et les doctrines de l'église répandue par les prêtres constitutionnels de la première heure mais plus efficacement les persécutions des partisans de la Révolution. Ainsi, les religieux prêtent serment par intérêt ou par crainte, même si la guillotine n'est encore qu'une menace, plus que par conviction.

Dans le Cher, les prêtres réfractaires deviennent l'exception à la règle. Le 2 avril 1792, dans le district de Sancoins dont dépend Cornusse, sur 48 curés et 7 vicaires, seuls 3 ecclésiastiques ne capitulent pas et s'obstinent à refuser de prêter serment à la Constitution civile du clergé : les curés de Cours les Barres, du Chautay et François JOVY, curé de Cornusse.

Un nouveau décret, signé le 26 août 1792, ordonne aux prêtres réfractaires de quitter la France dans les quinze jours sous peine de déportation en Guyane. Dès le 3 septembre, François JOVY prend son passeport vraisemblablement pour rejoindre la Suisse ou la Savoie dont les frontières sont les plus proches de sa contrée. Néanmoins, la veille de son départ, il renonce à l'exil : la crainte des massacres des prêtres réfractaires sur les routes, ses forces physiques ou bien les valeurs de son sacerdoce ont eu raison de son empressement.

François JOVY trouve asile à Bourges, Place Cujas, chez Madame de LA COUDRAYE. À son décès, il est inhumé dans la cave de la maison, de nuit, à la lueur des flambeaux pour protéger sa bienfaitrice car ceux qui cachent des prêtres réfractaires sont également passibles de mort.

Natif de Bourges, après avoir exercé à Morthomiers de 1781 à 1784, François JOVY a été nommé curé de Cornusse en décembre 1784. Il succède à Vincent DUVEAU, et cèdera la place dans une grande confusion à plusieurs curés de proximité ainsi que les curés LATRIGE et FARGIN qui signent en tant que curés de Cornusse.

François JOVY consigne son dernier acte sur les registres paroissiaux de Cornusse le 8 avril 1792 à l'occasion du décès de Marie CHASSIGNAT, âgée de 6 ans et demi, fille de Martin CHASSIGNAT et de Françoise Marie GUIGNÈRE, soit quelques mois avant la laïcisation de l'état civil instauré par un décret du 20 septembre 1792. À compter du 1er janvier 1793, les registres d'état civil de Cornusse sont rédigés et signés de la main d'un officier publique.

Henri MARTIN-ZÉDÉ

Marc GICQUIAUD

Christian BIDABE

Ce jeudi 13 janvier 2022, l’émotion était vive à Cornusse après l’annonce du décès de Christian BIDABE, son emblématique Maître d’école. Sa disparition a plongé bon nombre de ses anciens élèves dans leurs souvenirs d’enfance. L’odeur de la cire des casiers en bois, la poussière de la craie, le tableau devant lequel les enfants récitaient leçons et poésies, sur lequel d’une main hésitante ils traçaient lettres et chiffres, le taille-crayon fixé sur le bureau du maître, et puis ce grand gaillard, barbu, à la voix grave et sonore, face à ces jeunes enfants, impressionnés par sa prestance, qui le pensaient invincible. Tout revient en mémoire.

C’est à l’été 1972, que Christian s’installe dans le village avec sa famille. À l’âge de 26 ans, il y entame sa carrière d’instituteur qu’il mène jusqu’à son terme en 2002. Dans sa classe, au fil des années, se succèdent jusqu’à trois générations d’une même lignée. Son épouse Martine prend en charge la classe enfantine, le CP et le CE1 ainsi que la direction des deux écoles de Cornusse. Christian, quant à lui, ouvre sa classe unique à triple niveau pour y accueillir les enfants de 8 à 11 ans qu’il prépare à leur entrée au collège. Il pratique l’art de captiver l’attention de ses élèves, même les plus récalcitrants. Redouté par certains qui ne retiennent pas leurs tables de multiplication ou leur conjugaison, mais tous conquis par son sens pédagogique qui le motive à enchaîner les projets, les élèves viennent à l’école avec sérénité. En sportif accompli, il s’intègre volontiers aux jeux de la cour de récréation, raconte son pays basque, plaisante avec ses élèves créant ainsi un climat de confiance.
 
Instituteur atypique qui a engendré des vocations parmi ses élèves, pour lui l’enseignement ne se limite pas au calcul, à l’orthographe, à l’histoire…  il enseigne autant pour dispenser des connaissances que pour transmettre des valeurs. Ainsi, il fait découvrir le rugby, sport pour lequel il voue une véritable passion, à de nombreux enfants à l’Oval Club Sancoinnais en leur inculquant le respect, la discipline et la solidarité entre co-équipiers.
 
Instituteur innovant, tout comme Martine d’ailleurs, il n’hésite pas à prendre inscription dans sa classe d’enfants porteurs de handicap de l’IME voisin malgré la présence d’enseignants spécialisés affectés dans cet établissement par l’Éducation Nationale, pour stimuler l’intégration de ces enfants dans la société et apprendre aux autres l’inclusion. Il est animé par cette capacité d’instruire pour construire et accompagner ses élèves dans la poursuite de leur scolarité dans les meilleures conditions possibles que ce soit dans le cadre de cursus long comme court.
 
Instituteur dynamique, il organise de nombreuses manifestations qui concourent à l’animation du village tout en soulevant des fonds pour financer des séjours à la mer, aux sports d’hiver et autres sorties pédagogiques. D’humeur joviale, appréciant la vie, Christian avait cette faculté de fédérer élèves, anciens élèves, parents d’élèves, habitants du village et une foule d’amis dans des élans de sympathie.

Si sa disparition laisse un grand vide dans la vie de Martine, leurs enfants et petites-filles, le souvenir indélébile de ses années à l’école de Cornusse survit à jamais gravé dans la mémoire collective d’un village et de ses élèves.